Activités de l’APC

Article 4 / 9 , Vol 41 No. 3 (Automne)

Activités de l’APC

L’Assemblée législative de l’Ontario a un nouveau Président

Le 11 juillet 2018, les députés provinciaux de l’Ontario ont procédé à l’élection du député progressiste-conservateur Ted Arnott comme Président de l’Assemblée législative. Élu dès le premier tour de scrutin, M. Arnott l’a remporté sur les autres candidats, les députés progressistes conservateurs Randy HillierJane McKenna et Rick Nicholls.

Représentant la circonscription de Wellington-Halton Hills, M. Arnott a été élu à l’Assemblée législative pour la première fois en 1990 et il a siégé sans interruption depuis. M. Arnott a déjà été vice président de l’Assemblée législative et il a fait partie de l’équipe des présidents de séance pendant 13 des 15 dernières années.

Dans sa déclaration précédant le vote, M. Arnott a signalé aux députés qu’il avait de l’expérience à la présidence et qu’il avait siégé à l’Assemblée législative comme député du gouvernement, député de l’opposition et député d’un tiers parti. « J’ai vu les choses sous tous les angles », a-t-il dit. « Je me suis efforcé d’être juste et impartial et de faire preuve de respect envers tous les députés, tout en cherchant à maintenir le décorum à l’Assemblée. »

M. Arnott remplace le Président sortant Dave Levac, qui n’a pas présenté sa candidature lors des dernières élections générales. Il a indiqué à ses collègues qu’il est impatient de servir l’Assemblée tout comme il a servi ses électeurs. « Je suis tout à fait conscient des défis et des responsabilités que représente la présidence et je souhaite sincèrement m’acquitter de mes fonctions de façon juste et impartiale », a-t-il affirmé.

Diplômé de l’Université Wilfrid Laurier à Waterloo, M. Arnott a été adjoint exécutif de Jack Johnson, député provincial de Waterloo de 1987 à 1990, avant d’être lui même élu député.

Conférence régionale canadienne de l’Association parlementaire du Commonwealth (APC)

Les parlementaires de toutes les régions du pays se sont réunis du 22 au 27 juillet 2018 à Ottawa pour prendre part à la 56e Conférence régionale canadienne de l’APC.

Réunion des Femmes parlementaires du Commonwealth (FPC)

Le 22 juillet, le comité directeur des FPC Canada s’est réuni pour participer à une demi-journée d’atelier d’action stratégique. L’atelier, animé par la planificatrice stratégique Vicki Lass, était nécessaire pour aider l’organisation à se concentrer sur la transition des discussions vers des mesures concrètes, selon Laura Ross, présidente des FPC. L’objectif était d’établir une liste de mesures sur lesquelles chaque déléguée pourrait travailler pour aider les FPC a mener à bien leur mission, soit d’« aider les femmes et les jeunes filles canadiennes à découvrir leur potentiel sur le plan politique, à faire l’expérience de l’épanouissement que l’on peut tirer d’une carrière au service du public et à participer à la création d’une société meilleure ».

Parmi les objectifs des participants, nommons : créer une école de campagne numérique pour aider les femmes vivant dans des collectivités rurales ou éloignées; modifier la façon dont les femmes dirigeantes sont décrites dans les médias; mettre l’accent sur les obstacles économiques qui découragent ou empêchent les femmes de participer à la politique; et empêcher la partisanerie de diluer les objectifs que souhaitent atteindre les FPC.

Bien que les FPC considèrent les femmes comme des partenaires égales au Parlement canadien et dans les législatures provinciales et territoriales, les participantes ont souligné que « partenaires égales » ne signifie pas « en nombre égal ». Il doit y avoir du respect, de l’engagement et une véritable collaboration.

Mme Lass a parlé du concept du point de bascule dans la création d’un mouvement; c’est-à-dire l’atteinte d’une certaine masse critique faisant en sorte qu’il faut moins d’effort au mouvement pour se soutenir de lui-même. Elle a fait la promotion d’un modèle de mentorat (une femme par participante) pour aider à élargir le mouvement. Nadine Wilson, députée provinciale de la Saskatchewan, a fait remarquer qu’il était également important de sensibiliser les garçons afin qu’ils deviennent de bons soutiens à l’égard des femmes à l’âge adulte.

Au chapitre du passage de la parole aux actes, Mme Lass a expliqué l’importance de partager des histoires de réussite dans les circonscriptions, de participer à des activités de réseautage et d’intensifier les efforts de sensibilisation. Elle a guidé les participantes dans une activité de choix d’objectifs, qui portait sur la facilité de mise en œuvre et l’incidence. Ainsi, les objectifs immédiats devraient être les plus marquants et les plus faciles à mettre en œuvre afin d’obtenir quelques gains rapides pour lancer un mouvement.

Elle a conclu en suggérant que les FPC mettent sur pied un répertoire pour partager les histoires et les réussites de toutes les femmes, tout en se méfiant des anecdotes trop dures, comme les trolles sur les réseaux sociaux ou la discrimination, qui peuvent décourager les gens. Mme Lass a souligné que les médias visuels (comme Instagram) étaient particulièrement efficaces pour le partage d’histoires de réussites sur les réseaux sociaux. « Les gens se souviennent de 80 % de ce qu’ils voient, de 20 % de ce qu’ils lisent, et de seulement 10 % environ de ce qu’ils entendent » [TRADUCTION], dit-elle, ajoutant que les publications visuelles suscitent 650 % de plus de mobilisation que les publications en texte seul.

La séance administrative qui s’est tenue en après-midi comprenait un compte rendu sur le programme de rayonnement régional au Yukon présenté par la députée provinciale Geraldine Van Bibber, une présentation sur le nouveau site Web de FPC, et un rapport sur la visite de la présidente aux événements internationaux de l’APC.

La séance administrative de FPC du 23 juillet s’est amorcée après l’allocution d’ouverture de la présidente. Mme Ross, la présidente du conseil de direction de l’APC, Emilia Monowa Lifaka, et le secrétaire de la Section fédérale de l’APC, Rémi Bourgault ont officiellement procédé au lancement du nouveau site Web du groupe. Parmi les autres points importants à l’ordre du jour, mentionnons :

  • Mme Julie Green, députée provinciale des Territoires du Nord-Ouest, s’est portée volontaire pour diriger les comptes sur les réseaux sociaux de FPC.
  • La présentation d’un exposé sur la façon dont FPC a utilisé le financement consolidé de 2017-2018 pour créer des bannières à l’intention de tous les gouvernementaux provinciaux et territoriaux pour les événements ainsi que le nouveau site Web.
  • Les compte rendus de Mme Ross et de la députée ontarienne Yasmin Ratansi sur les nouvelles provenant des réunions internationales auxquelles elles ont participé au nom de FPC.

Au cours de la première séance de la journée, Mme Lifaka a parlé de son mandat en tant que présidente de l’APC visant à augmenter le nombre de femmes parlementaires dans le Commonwealth. Pour promouvoir le leadership chez les femmes, elle a dit qu’il était essentiel de continuer à utiliser des stratégies éprouvées (comme les programmes de formation au leadership, la promotion de l’autonomisation économique des femmes, la mise en œuvre ou l’élargissement d’un système de contingents éprouvé, et la sensibilisation) et d’encourager l’adoption de nouvelles stratégies innovatrices. Elle a également mentionné les plans visant à créer une semaine annuelle de sensibilisation à l’APC et aux FPC au cours du mois de mars. Lors d’une séance de questions et de réponses suivant sa présentation, Mme Lifaka s’est fait poser des questions sur les pratiques exemplaires visant à encourager la participation des femmes à la politique parlementaire. Elle a expliqué que les promesses de nouvelles conventions et de nouveaux appuis pleuvent; ce sont les instruments de mise en œuvre qui manquent. Elle a également soutenu que le recours à un système de contingents était important dans les situations où les femmes n’ont pas les mêmes ressources que les hommes (c.-à-d. des sièges réservés aux femmes).

Au cours de la deuxième séance, la mairesse de Red Deer, Tara Veer, a parlé de l’influence du mouvement #Moiaussi et des réseaux sociaux sur les politiques municipales. Mme Veer a relaté l’histoire d’abus vécu par Sheldon Kennedy, car ce récit s’est propagé dans toute la communauté et a grandement influencé la façon dont la ville a réagi au mouvement #Moiaussi. Elle a avancé que les réseaux sociaux offraient autant de possibilités que de défis. Elle n’a pas été une adepte rapide, mais elle s’en sert de plus en plus pour communiquer rapidement avec ses citoyens en tant que mairesse. L’accès accru aux responsables signifie également une augmentation de l’obligation de rendre des comptes. Cependant, il réduit également le côté formel du gouvernement. Mme Veer a expliqué comment certaines personnes avaient l’impression qu’un gazouillis équivalait à une demande formelle. Elle a également fait remarquer à quel point, parfois, un gazouillis confère une crédibilité à des propos qui auraient autrement été de simples ragots.

En effet, le mouvement #Moiaussi pose un défi pour les législateurs, car il peut miner la règle de droit (n’étant pas soumis aux règles de preuve). Il est pratiquement impossible de prendre toutes les accusations au sérieux, tout en s’assurant de l’application régulière de la loi. La réaction de la collectivité de Red Deer repose sur plusieurs principes : soutenir les personnes qui dénoncent; établir une culture de respect; adopter (et imposer) un code de conduite; établir une réglementation en faveur des donneurs d’alerte ou des mécanismes de protection de l’éthique; et autonomiser les spectateurs. Le principe final peut être attribué à Sheldon Kennedy et exige une réaction à dimension culturelle (tous soupçonnaient la présence d’abus, mais personne n’a dit quoi que ce soit qui aurait pu y mettre fin).

Au cours de la séance de questions et de réponses, Mme Veer a exposé comment elle donne suite aux comportements abusifs sur les réseaux sociaux, décrivant une réaction par volets. Si les utilisateurs publient des messages très offensants, elle les bloque, dit-elle, particulièrement s’il y a présence d’une tendance. Lorsqu’il s’agit de commentaires moins offensants, elle va répondre, indiquer son désaccord quant au langage ou au ton utilisé, et précisera qu’elle ne commentera pas la publication davantage. Elle encouragera alors plutôt l’utilisateur à communiquer avec son bureau de façon formelle s’il souhaite discuter davantage du sujet. Habituellement, elle dit recevoir le soutien des autres lecteurs de la publication. Quant à la troisième catégorie de publications, elle rectifiera toute désinformation (particulièrement lorsqu’il est question de sécurité publique), même lorsque le message est irrespectueux.

À la troisième séance, intitulée « Evolution of Ethics in Parliament » [l’évolution de l’éthique au Parlement], la sénatrice Raynell Andreychuk a fait remarquer que le privilège parlementaire était un concept important à saisir lorsqu’on examine les questions éthiques à l’intérieur d’un parlement. Les origines du privilège parlementaire canadien remontent à 1867, mais les questions d’éthique et de conflit d’intérêts n’étaient pas beaucoup abordées à l’époque. La respectabilité était l’apanage des hommes distingués : « mon honneur repose sur ma parole » [TRADUCTION].

La sénatrice Andreychuk a suggéré que le contexte (soit l’époque et la culture) est une composante importante de la définition d’un conflit d’intérêt et de l’éthique. En outre, elle variera selon les gens que vous représentez ainsi que leurs jugements et leurs attentes sur le plan des valeurs. Ces éléments doivent constamment être examinés, ajoute-t-elle. Les parlementaires devraient-ils être astreints à des règles plus rigoureuses? La sénatrice reconnaît que le débat se poursuit et qu’il n’est pas clos. Elle soutient que de nombreux parlementaires sont impressionnés et humbles à la suite de leur première élection; or, au fil du temps, ils peuvent perdre la capacité d’autocritique nécessaire à la mesure de leurs actions.

La sénatrice Andreychuk a expliqué que le Code régissant les conflits d’intérêts des sénateurs, créé au début des années 2000, portait principalement sur des questions monétaires et d’influence; la question du harcèlement était peu abordée et celle de l’éthique était plutôt lacunaire.

La quatrième séance portait sur la défense des droits dans la foulée du mouvement #Moiaussi. La conférencière Mari Murariu a présenté un point de vue intéressant sur la façon dont ce mouvement présente certaines difficultés pour les femmes participant à des activités partisanes et de lobbying avec des parlementaires.

Une grande partie du travail des élus repose sur les relations interpersonnelles, mais ces derniers ont commencé à prendre des mesures pour s’isoler. Citant « l’exemple de Mike Pence » (le vice-président américain a dit qu’il ne participerait à aucun repas avec une femme autre que son épouse pour éviter toute situation où l’on pourrait brandir une accusation de harcèlement), Mme Murariu a indiqué avoir constaté la réapparition, au Canada, de règles non écrites chez les parlementaires masculins visant à tenir uniquement des réunions portes ouvertes et à s’abstenir de socialiser ou de rencontrer des représentantes à des réceptions par crainte de se faire accuser d’inconduite. Elle affirme que ces règles auraient été observées tant au gouvernement fédéral que dans les gouvernements provinciaux. Ce fait complique grandement la tâche des femmes lobbyistes lorsqu’elles doivent tenir des discussions informelles ou aborder des sujets délicats, a-t-elle expliqué. Cependant, elle estime que la voie d’une réaction forte n’est pas toujours la meilleure.

En outre, les lobbyistes n’ont pas le droit de mettre les politiciens en position de conflit d’intérêts, toutefois, ce n’est pas le cas dans la situation inverse. Si un geste déplacé est fait à l’égard d’un lobbyiste, sa seule option est d’aller devant les tribunaux. Or, selon Mme Murariu, il s’agirait d’un suicide professionnel. En outre, de jeunes lobbyistes féminines lui ont fait part de leurs préoccupations en lien avec les comportements inappropriés d’hommes politiciens par le passé. Étant donné l’absence d’instance pour traiter ces dossiers formellement hors des tribunaux, elle leur avait suggéré d’en discuter avec leurs employeurs, d’expliquer leurs besoins, puis elle leur avait suggéré des options quant aux prochaines étapes. Elle a également parlé du système de l’Union européenne, qui exige l’inscription proactive des lobbyistes. En contrepartie, l’Union européenne leur permet de réserver des salles de réunion, ce qui confère un caractère plus formel au poste.

La dernière séance sur le mouvement #Moiaussi et les médias mettait en vedette Adrienne Batra, rédactrice en chef du Toronto Sun. Mme Batra a posé la question suivante : « comment trouvez-vous le point d’équilibre entre application régulière de la loi et condamnation rapide » [TRADUCTION]? Elle a dit que le Canada a eu plusieurs fois maille à partir avec ce concept, citant l’affaire Patrick Brown comme un exemple particulièrement révélateur de la chose à ne pas faire. Elle dit qu’en tant que journaliste, elle préfère avoir raison que d’être la première à diffuser une information. Elle a ajouté qu’elle n’aurait pas pu publier les allégations formulées contre M. Brown à la lumière du travail et des sources réunis par les journalistes. Mme Batra a pris pour exemple un cas d’actualité concernant des allégations à l’encontre du premier ministre remontant à quelques années. Elle a expliqué qu’il était du devoir des médias de lui demander de rendre des comptes, toutefois, ils se devaient d’être prudents et d’éviter de rapporter des détails ou des rumeurs non corroborés. Elle a dit que les médias doivent faire preuve d’introspection afin de départager l’information qui relève de l’intérêt public de celle qui pourrait détruire une personne publiquement. Mme Batra a également établi une distinction entre les médias traditionnels, qui disposent de codes d’éthiques et de règles encadrant leurs reportages, et les réseaux sociaux ainsi que les nouveaux médias, qui n’ont pas de procédures visant à se prémunir contre la fausse information ou ne permettant pas aux personnalités publiques de répondre aux déclarations.

Conférence régionale canadienne de l’APC

La conférence principale s’est amorcée le 24 juillet par une allocution d’ouverture du Président du Sénat George Furey et de la présidente régionale de l’APC, Yasmin Ratansi. M. Furey a fait remarquer que la conférence porterait sur des sujets traitant du non-respect de la règle de droit, de la manipulation des réseaux sociaux et des cyberattaques. La démocratie est menacée par ces actions, soutient-il, nous devons être vigilants. Mme Ratansi a ajouté que ces conférences permettent aux parlementaires de discuter sur la façon d’échanger des pratiques exemplaires en vue d’assurer la survie de notre démocratie parlementaire inspirée de Westminster.

Avant le début des premières séances, la présidente de l’APC, Emilia Lifaka, a présenté un aperçu de la route à parcourir pour l’organisation. Mme Lifaka est la première présidente de l’APC à avoir pris part à une conférence régionale canadienne, et les participants lui ont témoigné leur reconnaissance quant à sa présence aux séances tout au long de l’événement qui a duré une semaine.

Mme Lifaka a remercié les membres du chapitre canadien de leur collaboration et de leur engagement envers le travail de l’AC de l’APC. Elle a indiqué que son travail auprès des différents chapitres de l’APC lui rappelait un ancien adage africain : si vous voulez marcher vite, marchez seul; si vous voulez marcher loin, marchez avec d’autres. Elle a présenté un compte rendu des plans visant à modifier le statut légal de l’APC, passant du modèle d’un organisme caritatif à celui d’une nouvelle organisation. Mme Lifaka a souligné que les classes de maître de l’APC et ses initiatives de formation en ligne se poursuivront, et elle a annoncé son intention de lancer de nouveaux programmes à l’appui de ces temps nouveaux.

Séance 1 : Le Parlement et le mouvement #Moiaussi

Jane Hilderman de Samara Canada a expliqué que la question du harcèlement s’était immiscée dans son organisation. Elle a utilisé le temps qui lui était alloué pour résumer quelques études récentes. Sachant que les femmes sont touchées de manière disproportionnée par le harcèlement, les entrevues de départ de Samara ont révélé que de nombreuses anciennes députées, particulièrement les jeunes députées, sentaient que leur crédibilité était souvent remise en question et que leurs points de vue n’étaient pas aussi respectés que ceux des hommes. Les études menées par l’organisation sur le chahut ont révélé que malgré leur présence dans la même salle, les parlementaires entendaient un chahut très différent. En effet, 67 % des députées ont déclaré avoir entendu un chahut sexiste, contre seulement 20 % des députés.

Deux cent soixante-six (266) personnes (dont 122 femmes) ont répondu aux 1 500 sondages diffusés par Samara et la Presse canadienne à l’intention des membres du personnel de la Colline. Seul un peu plus du quart des répondants a affirmé avoir été victime de harcèlement sexuel sur la Colline du Parlement. Mme Hilderman a expliqué que, d’une part, certains remettent en question la validité statistique de cet exercice en raison d’un biais selon lequel les répondants y ont participé parce qu’ils voulaient parler de cet enjeu; d’autre part, les réponses de membres du personnel qui auraient pu avoir quitté leur emploi en raison du harcèlement sont également absentes du sondage. L’analyse révèle que le responsable n’était habituellement pas le député employant directement le membre du personnel, mais un collègue ou d’autres députés.

Mme Hilderman a fait remarquer que Rose St. Pierre, une chercheuse travaillant sur la Colline, avait rencontré 25 députés et un sénateur; ceux-ci s’étaient révélés excessivement effrayés par la perspective de fausses accusations. Elle a relevé les préoccupations de jeunes femmes membres du personnel quant à leurs perspectives d’emploi si ce climat perdurait.

Quant à une possible voie à suivre pour l’avenir, Mme Hilderman a suggéré, pour encourager la déclaration de cas d’abus, la création d’un rôle d’ombudsman indépendant chargé de conseiller les gens qui dénoncent ces situations et de faire le suivi des plaintes pour déterminer s’il s’agit d’une tendance justifiant une intervention. Quant à la culture de mauvaise gestion sur la Colline, où chaque député et sénateur est, en soi, une petite entreprise, elle a soutenu qu’il était nécessaire de fournir davantage de formation et d’outils de sensibilisation.

Julie S. Lalonde, formatrice féministe, a abordé les sujets de la violence sexuelle dans de nombreux milieux et espaces de travail. Elle a expliqué aux participants qu’elle leur donnerait cinq éléments pour les aider à régler ce problème. Avant tout, elle a encouragé les participants à cesser de réagir aux incidents et à réfléchir davantage à la prévention. Bon nombre des personnes à qui elle s’est adressée ont manifesté un cynisme convaincu à l’égard de la possibilité de voir les choses changer; or, elle soutient que c’est faux. Il reste encore beaucoup de possibilités d’améliorer la situation.

Premièrement, elle a dit aux parlementaires qu’ils « n’étaient pas différents » [TRADUCTION]. Elle a ajouté : « La situation n’est pas “propre” à vous. Ne tournez pas autour du pot à en parler à l’interne. La dynamique peut être unique, mais cela reste un milieu de travail » [TRADUCTION]. Deuxièmement, elle a affirmé que nous devions définir certains concepts. « Quelles sont les caractéristiques d’un milieu de travail sécuritaire et équitable? » [TRADUCTION], a-t-elle demandé. Bien que nous devions permettre les divergences d’opinions, la définition du consentement ne devrait pas être étrangère à qui que ce soit. « Nous devons avoir des discussions concrètes sur les gains que nous souhaitons réaliser, et non seulement sur les situations que nous voulons éviter » [TRADUCTION], a-t-elle suggéré.

Troisièmement, elle a indiqué qu’il était important de retenir que la violence sexuelle n’était pas seulement un enjeu légal, mais également un enjeu moral. En outre, si le seuil de l’acceptabilité équivaut au critère « légal », alors celui-ci est beaucoup trop bas, selon Mme Lalonde. Par ailleurs, si ce type de discussion engendre des tensions dans un milieu de travail, les participantes devraient chercher à en connaître la raison. « Vous devez faire confiance aux femmes » [TRADUCTION], a-t-elle ajouté. « Si vous ne pouvez pas leur faire confiance, c’est que vous croyez que les femmes mentent ou exagèrent. Ayez confiance que les femmes qui dénoncent disent la vérité. Statistiquement, vous êtes tout aussi susceptible de mettre le feu à votre maison pour réclamer l’assurance que vous l’êtes de formuler de fausses accusations de viol. Par contre, entend-on dire qu’une maison a “présumément” pris feu? La réponse est : non » [TRADUCTION].

Quatrièmement, déterminez ce que vous souhaitez obtenir à l’issue de cette discussion. Les gens veulent-ils des excuses? Que faire si la personne n’est pas sincère? Est-ce qu’on souhaite une restitution? Ou s’agit-il seulement d’acheter le silence? Mme Lalonde a affirmé que les questions fondamentales sont les suivantes : croyons-nous que les gens peuvent changer, et que faisons-nous pour mettre en place des conditions qui permettent aux femmes de dénoncer?

Cinquièmement, Mme Lalonde a expliqué que « les survivantes vous écoutent. Quelle est votre réaction? Êtes-vous cynique? Êtes-vous méprisant? » [TRADUCTION]. À son avis, il est important que les comportements inappropriés soient vigoureusement sanctionnés, faute de quoi il n’y aura aucun changement.

Séance 2 : Ingérence d’autres pays dans le processus démocratique

Au cours de cette séance, deux conférenciers ont tracé les grandes lignes de quelques questions à prendre en compte lorsqu’on réfléchit à la façon dont des agents étrangers pourraient s’ingérer dans le processus démocratique.

Fenwick McKelvey, professeur agrégé en étude des communications à l’Université Concordia, a amorcé sa présentation en rappelant l’histoire du projet de la Grande liste canadienne de souhaits [TRADUCTION] de la CBC, qui avait été miné par des groupes d’intérêts bien organisés. Les suivants figuraient parmi les plus grands vœux : 1. Que le Canada interdise l’avortement; 2. Que le Canada demeure en faveur du choix des femmes; 3. Qu’il y ait un retour spirituel dans notre nation; et 4. Que le Canada rétablisse la définition traditionnelle du mariage. Les groupes de défense avaient soutenu leurs enjeux par le truchement de campagnes numériques. Toutefois, y avait-il eu ingérence de la part d’entités étrangères dans ce sondage?

Parmi les leçons à retenir de cette histoire, M. McKelvey a souligné que les plateformes ont un poids, que l’attribution et l’application sont difficiles, et que le caractère étranger est un moyen problématique de juger de la légitimité politique (puisque ces campagnes avaient probablement nécessité la participation de complices canadiens). Par contre, ces leçons s’appliquent de façon plus générale lorsqu’on réfléchit à la manière de combattre les campagnes de désinformation financées par des États et les points de vue extrémistes et attentatoires qui minent les démocraties libérales. Il a suggéré d’inclure, dans les prochains plans politiques, des mesures pour régler les questions d’attribution et les lacunes dans l’application de la loi; d’établir une meilleure gouvernance des plateformes de réseaux sociaux; et de soutenir le journalisme et la diffusion de renseignements politiques de grande qualité et des discussions à propos d’établissement d’un code de conduite pour les partis politiques afin qu’ils alertent les autres en cas de soupçons d’ingérence étrangère.

Michael Peirce, directeur adjoint du renseignement au Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), a demandé aux participants s’ils avaient publié un gazouillis aujourd’hui. Plusieurs mains se sont levées, puis il a affirmé à la blague qu’il ne donnerait pas la version top secrète de sa présentation, qui comprend une évaluation des menaces. M. Peirce s’est concentré sur l’influence étrangère clandestine et nuisible au Canada. Au Canada, a-t-il fait remarquer, cette activité ne se produit généralement pas sur les réseaux sociaux, elle se produit en personne. Soulevant des exemples tirés des rapports publiés dans les médias plutôt que du renseignement internet du SCRS sur les autres menaces, M. Peirce a illustré comment l’activité clandestine russe a tendance à être nihiliste (destructrice, visant à déranger les démocraties et à semer le chaos, ou amplifiant le sentiment extrémiste national), tandis que la Chine visait la stabilité du régime (s’attaquant aux « cinq poisons », y compris les activités des adeptes du Falun Gong, et les partisans de Taïwan). Toutefois, a-t-il souligné, certains secteurs sont également vulnérables aux influences ou à la prise de contrôle.

M. Peirce a relevé trois périodes d’ingérence étrangère clandestine : avant les élections (lorsqu’on cible le processus de nomination); durant les élections (les cibles sont alors les finances et la réglementation électorales); et suivant les élections (lorsque l’influence cible les membres du personnel ou les responsables politiques). Il s’est dit d’accord avec M. McKelvey sur la nécessité d’examiner la possibilité d’adopter un code de conduite pour les partis politiques. Il a indiqué que la question de l’ingérence étrangère dans les élections canadiennes n’est pas partisane; l’ingérence n’est pas susceptible de se limiter à des partis individuels. Il est important de resserrer des failles dans le financement électoral et dans les limites de dépenses de tiers (particulièrement celles qui ont été établies lorsque les médias traditionnels dominaient le marché et qui risquent de ne plus être appropriées). La sensibilisation et l’éducation aux médias sont également importantes.

Séance 3 : La recherche de l’équilibre travail-famille dans l’horaire parlementaire

Dans le cadre d’une discussion en groupe sur l’équilibre travail-famille, les parlementaires fédéraux et provinciaux ont discuté des moyens qu’ils prenaient pour s’assurer de préserver leur santé et leurs relations tout en gérant un horaire de travail chargé. Le député de Terre-Neuve-et-Labrador Nick Whalen a parlé de la place prioritaire de la santé dans sa vie, dans celle de ses enfants et de son épouse (qui est atteinte de sclérose en plaques progressive secondaire). Il a expliqué que son amitié avec les whips et ses collègues l’a aidé lorsqu’il devait s’absenter et s’occuper en priorité de sa famille. Si vous vous poussez trop, a averti M. Whalen, votre santé pourrait être mise en péril et votre personnel ne saura pas nécessairement comment vous venir en aide. Il a soutenu qu’il était important que les parlementaires établissent leurs propres limites.

La députée provinciale ontarienne Catherine Fife a indiqué qu’il pouvait être très difficile de concilier ambition et famille. En outre, le caractère immédiat des réseaux sociaux et du courriel a apporté des changements. Elle a adopté une stratégie d’interruption et de déconnexion ponctuelles. Mme Fife a décrit la charge du « travail émotionnel » que les politiciens portent sur leurs épaules en tout temps. Elle a rappelé que les taux de divorce chez les politiciens étaient deux fois plus élevés que la moyenne nationale. Un jour, raconte-t-elle, son mari lui a demandé : « comment a été ta semaine? » [TRADUCTION]. Sa réponse (« tu pourrais m’économiser beaucoup de temps si tu me suivais simplement sur Twitter » [TRADUCTION]) n’a pas été bien reçue. Toutefois, elle a encouragé les parlementaires à se rappeler de la valeur du travail qu’ils accomplissent. Elle a raconté que sa fille l’a décrite comme « quelqu’un qui fait bouger des choses » [TRADUCTION] dans le cadre d’une entrevue pour un projet sur les femmes en politiques. « C’est une réponse éloquente qui justifie les sacrifices » [TRADUCTION], a-t-elle conclut.

Le député provincial du Yukon, Nils Clarke, a expliqué comment la vie se transformait dès qu’on devenait une personnalité publique. Il a raconté comment quelque chose d’aussi simple que de faire ses courses peut s’avérer être un long processus alors qu’il s’arrête pour parler à ses électeurs. Il encourage souvent ses fils adolescents à prendre une autre voiture au cas où ils souhaiteraient rentrer plus tôt. Bien qu’il ait des discussions formidables avec ses fils sur des questions politiques, il essaie également de prendre le temps de tenir des échanges sur la musique et les célébrités. Toutefois, M. Clarke a indiqué qu’il pouvait être difficile de trouver du « temps de qualité » avec des enfants plus âgés, car ils ne veulent pas toujours passer du temps en votre compagnie.

Le député manitobain Daniel Blaikie a un point de vue unique en tant que fils de parlementaire et aujourd’hui lui-même parlementaire et père. Il a dit que la politique est vraiment comme une entreprise familiale (non seulement pour le conjoint ou l’époux, mais également pour les enfants). Les politiciens ont besoin que leur famille comprenne leurs motivations à être en politique, a-t-il expliqué. « Ils ne veulent pas en faire partie, mais ils veulent savoir pourquoi vous vous absentez d’une activité à l’école ou d’une fête d’anniversaire. Les enfants ont besoin de savoir que leur sacrifice en vaut la chandelle, que le travail est important » [TRADUCTION], a-t-il dit. « Le temps de qualité que vous passez avec votre famille est également important. Nous n’avons pas beaucoup de pouvoir quant à la durée du temps passé en famille, mais nous décidons de sa qualité » [TRADUCTION].

Durant la période de questions et réponses, les participants ont parlé de changements à l’horaire d’une assemblée législative, qui peuvent rendre leur travail plus approprié selon les besoins des familles. D’autres participants ont mentionné les soins aux parents aînés comme un sujet souvent oublié dans ces discussions. Mme Fife a souligné l’importance de prendre soin de soi et a révélé que son personnel prévoyait désormais du temps à son horaire pour qu’elle prenne du temps de repos. Au début, elle était réfractaire à cette pratique, aujourd’hui, celle-ci fait partie de la culture de son milieu de travail, a-t-elle fait remarquer. Un député de la Nouvelle-Écosse a fait remarquer que ses enfants adultes font ajouter des rendez-vous à son horaire par son bureau pour réserver du temps personnel consacré à des événements importants. « Lorsqu’ils sont à l’agenda, rien d’autre ne peut les en déloger » [TRADUCTION], a-t-il dit. Un délégué de la Colombie-Britannique a indiqué que l’assemblée provinciale avait récemment modifié les règles sur la présence d’« étrangers » dans la Chambre pour permettre la présence de nourrissons.

Séance 4 : Sous-représentation des femmes au Parlement

L’APC reconnaît la sous-représentation des femmes au Parlement depuis déjà 30 ans; c’est d’ailleurs ce qui a mené à la création de FPC. Par contre, il n’y a eu qu’une faible augmentation dans la représentation fédérale depuis cette époque. Le Sénat et certaines assemblées provinciales sont parvenus à passer le seuil des 30 %, mais les conférences ont soutenu qu’il s’agissait toujours d’un seuil peu élevé.

L’ancienne députée du Québec Eleni Bakopanos et la directrice d’Equal Voice (EV), Nancy Peckford, ont présenté une mise à jour aux participants de leurs travaux visant à promouvoir l’augmentation de la représentation des femmes. Mme Bakopanos a mentionné plus particulièrement le programme familial parallèle à la conférence, qui se révèle fort utile pour elle lorsqu’elle est au Parlement. En tant que mère de jeunes enfants cherchant à passer du temps avec eux durant l’été, ce programme lui permet de participer à ce genre de conférences.

Mme Peckford a souligné le succès de Daughters of the Vote [Héritières du suffrage] ainsi que la contribution de Condition féminine à EV qui leur a permis de travailler à des projets visant à apporter des changements systémiques. Mme Bakopanos a expliqué qu’EV cherchait à encourager un changement durable à long terme afin de favoriser l’augmentation du nombre de femmes en politique. Parmi les recommandations figurent l’offre de services de garde d’enfants, la participation à distance aux réunions de comités (non seulement pour les parents de jeunes enfants, mais également pour ceux ayant des parents âgés), la réduction de la nécessité de voyager, l’établissement d’un caractère prévisible à la fonction en fixant les dates d’élection, et en faisant du vendredi un jour optionnel pour les députés (l’Assemblée nationale du Québec le fait déjà). Mme Peckford a également reconnu que les élus avaient besoin de davantage de personnel pour rendre le service politique plus durable. Elle a dit qu’Equal Voice peut agir comme porte-parole des politiciens, puisque l’organisme ne sera pas perçu comme servant ses propres intérêts.

La députée territoriale des Territoires du Nord-Ouest, Julie Green, a fait une présentation sur les mesures temporaires adoptées aux T.N.-O. visant à augmenter la représentation des femmes. Elle a informé les participants de la sous-représentation chronique des femmes aux T.N.-O. De fait, elle ont été au nombre de trois depuis 1995, et elles sont deux à l’heure actuelle. Une motion spéciale sera déposée afin d’ébranler le statu quo et d’augmenter la représentation des femmes à 20 % d’ici 2023 et à 30 % d’ici 2027. Bien qu’il s’agisse d’objectifs modestes, Mme Green a dit croire qu’elle aborde des sujets différents de ses collègues masculins et que l’ajout de députées féminines permettra de mieux représenter la diversité du territoire.

Mme Green a mentionné l’expérience samoane, un exemple que le territoire pourrait suivre. Samoa, accablé par la sous-représentation des femmes depuis longtemps, a adopté des mesures temporaires pour garantir des sièges aux femmes. Par exemple, si moins de cinq femmes étaient élues, des sièges spéciaux étaient ajoutés, mais uniquement pour la durée de vie de cette assemblée. Elle a résumé quelques-uns des avantages et des inconvénients de ce type de système. Certains ont fait valoir leurs préoccupations à l’égard d’un système à deux paliers, ou ont soutenu que la création de contingents créait un plafond artificiel. En contrepartie, d’autres ont soutenu qu’à défaut de propulser la participation des femmes (soit la promotion par l’émulation), ces mesures réduiraient les obstacles. En outre, si ces élues à titre de représentantes spéciales travaillent bien, il est à parier qu’elles recevront plus de soutien à l’avenir.

La députée provinciale manitobaine, Collen Meyer, a fait remarquer que la proportion de femmes se situait à 25 % dans son assemblée provinciale. Elle a affirmé que les hommes devaient se mobiliser aux côtés des femmes pour obtenir du changement. Elle a indiqué que l’établissement de la confiance par la mobilisation devrait être une stratégie clé pour encourager les femmes et que l’âge ne devrait pas être un obstacle. Mme Meyer a fait remarquer que l’aversion pour la couverture médiatique négative et le doute de soi quant à la capacité de tout gérer étaient des thèmes courants chez les nouvelles parlementaires et les anciennes. Elle a dit que les réseaux de soutien aux femmes permettant de surmonter ces obstacles et ces craintes étaient un outil important.

La députée ontarienne Anita Vandenbeld a repris les commentaires de Mme Green, en soulignant que bien qu’on observe au Canada une augmentation de la présence des femmes en politiques, d’autres pays (particulièrement en Afrique subsaharienne) s’amélioraient à des rythmes plus rapides que le nôtre. Elle a mentionné que les pays ayant adopté des contingents ou des mesures temporaires ou une mode de scrutin proportionnel parvenaient à élire davantage de femmes que les autres.

Mme Vandenbeld a fait remarquer que le pouvoir associé au mandat signifie que les femmes sont plus susceptibles d’être élues lors d’élections « pour le changement » ou après des événements comme des guerres, car elles sont davantage perçues comme des « agents de changement ». Toutefois, même lorsque cela se produit, il subsiste des obstacles, tels que les suivants : 1) les stéréotypes et les normes sexistes (elle a posé la question à savoir pourquoi parlait-on toujours d’elle comme une « jeune femme candidate » ou était décrite à l’aide d’adjectifs réducteurs); 2) les réseaux financiers; 3) la préparation, la formation et le renforcement des capacités; 4) la sécurité; 5) le processus d’investiture. (Elle a révélé qu’Equal Voice avait réalisé des études indiquant que lorsqu’une femme figurait sur un bulletin de vote, elle était élue dans la moitié des cas. Par conséquent, les Canadiens sont à l’aise avec l’élection de femmes. Or, au stade de l’investiture, les membres des partis se demandent « qui le public va-t-il élire »). Elle a ajouté que les études laissent entendre que 80 % des Canadiens voteraient pour une femme, mais que par ailleurs, 80 % des gens croient que la plupart ne le feraient pas concrètement.

Mme Vandenbeld a soutenu que les femmes sont également moins susceptibles de penser à se lancer en politique. Ce n’est pas qu’elles rejettent la politique, mais elles n’y pensent simplement pas. Elle a affirmé que les femmes vont souvent songer à entrer en politique lorsqu’un parti leur en fait la demande, mais elles ne déposeront pas leur candidature à l’investiture avant d’apprendre que d’autres sont intéressés par leur candidature. Elle a terminé en admettant avec regret que les femmes sont parfois leurs propres ennemies dans ce processus; parfois, elles bloquent d’autres femmes, car elles estiment que les places sont limitées.

Durant la période de questions et réponses, un participant a expliqué que bien qu’il soit important de recruter des femmes, des personnes transgenres, des gens des minorités visibles et d’autres groupes pouvant être marginalisés, il était important que les partis leur donnent l’infrastructure et le soutien pour réussir une fois recrutés. Autrement, il ne s’agit que d’efforts symboliques.

Séance 5 — Relations interparlementaires (partie 1)

Colin Robertson, vice-président et boursier à l’Institut canadien des affaires mondiales, a ouvert la séance en affirmant la nécessité de soutenir un ordre commercial libéral fondé sur des règles pour assurer notre survie. « Le Canada tire la majorité de ses revenus du commerce » [TRADUCTION], a-t-il dit. « Sans le commerce, nous ne serions pas ici aujourd’hui » [TRADUCTION]. M. Robertson a ajouté que les Canadiens se sont taillé une place dans la chaîne d’approvisionnement et qu’un emploi sur six au Canada était lié à l’exportation.

Laura Dawson, directrice de l’lnstitut sur le Canada du Centre Wilson, n’a pas mâché ses mots lorsqu’elle a dit que la situation actuelle concernant l’ALENA « était à son point le plus bas historiquement » [TRADUCTION], sur le sujet des accords commerciaux. MmeDawson a expliqué que « vous ne pouvez pas utiliser une solution économique pour régler un problème politique » [TRADUCTION]. Elle a expliqué que sur les 32 chapitres de l’ALENA, neuf étaient réglés. Elle croit que certains points de discorde dans d’autres chapitres peuvent être réglés; toutefois, la Maison-Blanche a proposé cinq à six éléments que nous ne pouvons simplement pas accepter.

Les difficultés liées à l’ALENA sont également mélangées aux mesures de sécurité américaines (connues comme les « tarifs douaniers en vertu de l’article 232 »). Mme Dawson a dit ne pas s’attendre à ce que ces tarifs soient éliminés avant la tenue des élections au Congrès. Toutefois, elle a expliqué que le Canada dispose d’une capacité unique de faire la promotion de ses intérêts durant ces négociations. « Nous n’occupons pas une place particulièrement importante au sein de la politique étrangère américaine » [TRADUCTION], a-t-elle affirmé, « mais nous jouons un rôle très important dans la politique intérieure des États-Unis. Aucun autre pays n’entretient des liens aussi étroits avec eux » [TRADUCTION]. Elle a encouragé les délégués à se servir de leurs relations avec des représentants locaux, à encourager des chefs d’entreprises à dialoguer avec des représentants américains, et à faire la promotion de la qualité des relations entretenues depuis de nombreuses années, et qui peuvent se poursuivre encore pour longtemps. « Nous n’avons jamais connu de moments aussi difficiles dans cette relation » [TRADUCTION], a-t-elle admis. Mme Dawson a encouragé les parlements ou les chefs d’entreprise à ne pas se contenter d’un « oui » lorsqu’ils interagissent avec leurs homologues américains ou qu’ils les rencontrent. « Vous devez être directs, adopter une politique de contrepartie » [TRADUCTION], a-t-elle conseillé. « Allez au-delà des rencontres » [TRADUCTION].

Séance 6 : Relations interparlementaires (partie 2)

La sénatrice ontarienne Salma Ataullahjan, vice-présidente du Groupe canadien de l’Union interparlementaire (UI), a souligné l’importance d’une mobilisation visant le renforcement de la confiance dans les unions interparlementaires. L’UI a été créée il y a près de 130 ans dans le but de régler les différents internationaux de façon pacifique. Son travail au Comité sur les questions relatives au Moyen-Orient lui a montré l’ampleur du potentiel de cette organisation. « Les interactions ne sont pas toujours élégantes. Les esprits peuvent s’échauffer, il peut y avoir des cris, mais le dialogue se poursuit » [TRADUCTION], a-t-elle raconté. « Nos travaux sont souvent dénigrés parce qu’ils sont perçus comme du simple bavardage sans résultat concret, mais nous, parlementaires, connaissons l’importance du dialogue » [TRADUCTION].

Jacques Chagnon, président de l’Assemblée nationale du Québec et président de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF), a parlé de l’accord bilatéral récent conclu entre les présidents d’assemblées, et a ajouté que le poste de président d’assemblée permettait souvent aux titulaires de tisser des liens spéciaux avec d’autres présidents d’assemblées dans la communauté internationale. M. Chagnon a également expliqué comment les programmes de perfectionnement professionnel pour les parlementaires et le personnel créés par cette organisation s’étaient révélés extrêmement utiles.

Au cours de la période de questions et réponses, un parlementaire a demandé au groupe comment les représentants nommés à ces organisations pouvaient parvenir à convaincre leurs collègues de la valeur de ces réunions et changer la perception selon laquelle il ne s’agirait que de « parties de plaisir aux frais du contribuable ». M. Chagnon a expliqué que les liens tissés au fil de ces échanges n’engendrent peut-être pas d’avantages concrets, directs et immédiats, mais que les avantages indirects sont immenses. Il a également fait remarquer que ces réunions généraient des retombées économiques, comme le tourisme, pour les collectivités locales lorsque le Canada en était l’hôte. De plus, M. Chagnon a soutenu que le fait, pour les parlementaires, d’aborder leur participation sous l’angle d’« invités » de pays étrangers pouvait contribuer à réduire l’irritant des détracteurs populistes, selon lesquels ces réunions sont des « parties de plaisir ». Un autre participant a mentionné le cas d’un ancien sénateur, participant à l’UI, qui était désormais souvent invité à agir en tant que médiateur dans des conflits à l’étranger et à intervenir au nom de parlementaires emprisonnés ou qui sont en attente d’être exécutés en raison de leurs activités politiques. Il a soutenu que ces organisations sont très importantes pour la diplomatie et la protection des libertés politiques.

Séance 7 — Trouver l’équilibre entre vie publique et vie privée à l’ère des réseaux sociaux

Au cours de la dernière séance de la conférence, les membres du groupe de discussion ont décrit les façons dont les réseaux sociaux ont transformé les attentes quant à la communication des politiciens. Tamara Small, professeur agréée à la University of Guelph, a parlé de la façon dont la recherche universitaire a cerné les tendances portant sur la personnalisation des réseaux sociaux, qui peuvent parfois dépasser l’influence des partis dans les messages. La gamme de la personnalisation comprend à une extrémité les publications portant sur des volets personnels de la vie et des activités non politiques; le centre comprend les opinions et les intérêts personnels sur des enjeux politiques, mais non centraux au parti; et à l’autre les messages et les communications partisanes. Mme Small a indiqué que l’ajout de la touche personnelle en politique permettait d’augmenter le sentiment de lien avec un politicien et suscitait un meilleur souvenir. Fait intéressant, la personnalisation des messages s’est retournée contre les partisans convaincus. Elle a conclu que les parlementaires devaient garder leur public à l’esprit lorsqu’ils publient sur les différentes plateformes; elle a également reconnu qu’environ les deux tiers des Canadiens ne suivaient pas les politiciens en ligne. Conséquemment, la part du public numérique formé de journalistes, d’opposants et de partisans pourrait être trompeuse, ce qui pourrait augmenter les désaccords.

La députée albertaine Michelle Rempel a joint un vaste public sur les différentes plateformes de réseaux sociaux. Elle est reconnue par les médias et les autres parlementaires comme l’un des politiciens les plus accomplis du pays en ce qui a trait à la présence et à la portée en ligne. Elle s’est dite en désaccord avec Mme Small quant à la taille minime du public sur les réseaux sociaux par rapport à la population générale. Elle a expliqué que les statistiques, qu’elle suit, quant aux réactions du public suggèrent une mobilisation beaucoup plus importante. De plus, elle a affirmé qu’il lui était généralement plus utile de parler dans son téléphone qu’aux médias comme la CBC, car elle pouvait ainsi rejoindre beaucoup plus de gens d’une façon plus individuelle.

Mme Rempel a décrit le contenu sur ses comptes de réseaux sociaux comme portant sur son travail en tant que parlementaire. Bien qu’elle aime le concept de l’individualisation, elle parle plutôt qu’un sentiment « d’authenticité ». Elle a fait remarquer que, selon ses impressions, les politiciens qui laissent leur personnel se charger de leurs publications sur les réseaux sociaux avaient beaucoup moins de succès à obtenir des abonnés que ceux qui se forgent leur propre voix. Elle ne fait aucun commentaire sur sa vie privée en ligne. Elle estime que les médias canadiens n’y toucheront pas non plus à moins que 1) vous soyez hypocrite ou 2) vous en parliez vous-même. Finalement, elle a encouragé les participants à faire la distinction entre les trolles (ces gens qui publient des messages incendiaires et formulent des critiques non fondées) et les abus (les menaces à votre endroit). Elle a conseillé aux participants de simplement bloquer les comptes des premiers, et de rapporter les seconds aux autorités.

Le député de l’assemblée provinciale albertaine Thomas Dang a expliqué que les politiciens utilisaient ces types d’outils depuis maintenant 20 à 25 ans. Le nom des médias a certes changé, mais le désir de rester connecté demeure le même. Il a fait valoir que les réseaux sociaux permettent simplement aux parlementaires de rejoindre leurs électeurs et les autres membres du public plus rapidement. M. Dang a également affirmé que les réseaux sociaux peuvent être extrêmement bénéfiques pour les politiciens afin de leur permettre de rester en communication avec leurs familles durant les sessions ou lors de leurs déplacements professionnels. Par exemple, la transmission en direct ou le partage de vidéo peut leur permettre d’être « présents » au cours d’événements importants qu’ils manqueraient autrement.

La députée québécoise Alexandra Mendes a expliqué comment les parlementaires québécois fonctionnaient concernant la nécessité de publier en plus d’une langue. Cette duplication des messages peut alourdir les comptes sur les réseaux sociaux et rendre les interactions plus difficiles. Elle a dit qu’elle utilisait sa page de politicienne sur Facebook pour défendre des enjeux qui lui tiennent à cœur et à ses animaux (par exemple, le bien-être animal). Mme Mendes a également raconté comment les réseaux sociaux peuvent tordre ce qu’en entendent les politiciens. En 2016, elle avait prévu tenir son activité pour la fête du Canada dans le stationnement du Centre culturel et communautaire islamique local. Un électeur a publié en ligne un avis qu’elle avait envoyé pour promouvoir l’événement et a soulevé la question à savoir pourquoi l’événement était-il lié à une organisation religieuse et culturelle. Même si l’événement avait eu lieu dans le stationnement et non dans le Centre, la publication a soulevé un tollé et généré de nombreux commentaires et menaces islamophobes. La GRC a dû être appelée. Or, hormis l’auteur du premier message, Mme Mendes a remarqué qu’aucun des autres messages ne provenait de gens de son comté. Elle a dit avoir une expérience positive avec les réseaux sociaux, malgré cet incident.

À la période de questions et réponses, un participant a demandé comment les politiciens, des personnalités publiques, pouvaient accepter la notion de « bloquer » des membres du public pour les empêcher de les suivre sur les réseaux sociaux. Mme Rempel a expliqué qu’elle avait élaboré un graphique publié sur son site Web et sur sa page Facebook expliquant son processus décisionnel. En somme, elle n’interagira pas avec des gens qui décident de ne pas rester civilisés. « Je n’ai pas à tolérer les abus » [TRADUCTION], a-t-elle affirmé. Elle a également fait la distinction entre les fonctions de blocage et de silencieux sur les réseaux sociaux. En outre, un participant a fait remarquer que l’option « silencieux » permet d’éviter au politicien de voir les commentaires d’un auteur problématique. Or, comme l’a expliqué Mme Rempel, ceci n’empêche pas l’utilisateur de continuer à utiliser la plateforme du politicien sur les réseaux sociaux pour diffuser son message abusif ou haineux.

Mme Rempel a également fait remarquer qu’à son avis, les parlementaires ne sont pas aussi prudents qu’ils devraient l’être lorsqu’il est question de collecte de renseignements personnels ou de respect de la vie privée. Elle a expliqué qu’elle séparait toujours clairement les données qu’elle reçoit dans le cadre d’activités parlementaires et politiques et qu’elle s’assurait toujours d’obtenir le consentement des gens. Elle a agi de la sorte, car le discours sur la collecte de données est encore jeune en ce qui a trait à la protection de la vie privée et elle ne veut pas avoir à départager les données de nouveaux advenant l’adoption de nouvelles lois.

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