Les bibliothécaires de recherche de la Bibliothèque du Parlement

Article 6 / 15 , Vol 43 No. 1 (Printemps)

Les bibliothécaires de recherche de la Bibliothèque du Parlement

When you have questions, the Library of Parliament’s research librarians can help you find answers. As a part of the Library’s Parliamentary Information and Research Service (PIRS), some of these research librarians are embedded in its multidisciplinary sections while others are based in the library’s five branches. In this article, the authors trace the emergence of research librarians back to the early days of widespread Internet use, explain how their role has evolved, and offer examples of how they collaborate with the library’s analysts to provide information products and training. They conclude by noting this organizational structure provides librarians with opportunities to develop expertise in a given subject area and provides analysts with the support they need to serve individual parliamentarians and parliamentary committees and associations.

Par Michael Dewing et Meghan Laidlaw

Bibliothécaires de recherche : Qui ils sont et ce qu’ils font

Beaucoup de gens connaissent l’édifice emblématique de la Bibliothèque du Parlement sur la Colline parlementaire à Ottawa. Jusqu’à la fermeture de lédifice du Centre au début de ٢٠١٩ pour rénovation, il abritait une collection de quelque 600 000 articles et remplissait le rôle de succursale principale de la Bibliothèque.

En revanche, les gens savent généralement peu de choses sur le rôle que joue la Bibliothèque en matière de travaux de recherche. En 2017-2018, le personnel de la Bibliothèque a non seulement répondu à environ 11 900 demandes d’information et de référence, mais aussi à 5 600 demandes de recherches et d’analyses présentées par des comités et des associations parlementaires ainsi que par des parlementaires à titre individuel. Ces réponses se présentent sous la forme de courriels concis, mais aussi d’importantes ébauches de rapport et études générales destinées à des comités et associations parlementaires.

Ces réponses sont produites par le personnel du Service d’information et de recherche parlementaires (SIRP), dont les bibliothécaires de recherche font partie intégrante. En effet, 15 de la trentaine de bibliothécaires de recherche de la Bibliothèque sont affectées aux sections pluridisciplinaires du SIRP. Les autres travaillent dans les cinq succursales de la Bibliothèque qui sont situées dans différents édifices de la Cité parlementaire.

Le SIRP compte deux divisions de recherche, dont chacune est constituée de six sections. Ces sections se penchent sur des sujets qui correspondent aux mandats des comités parlementaires. Il y a, par exemple, la Section des affaires constitutionnelles et parlementaires, la Section des ressources, de l’énergie et des transports, et la Section de la politique économique, budgétaire et monétaire.

Chaque section compte de six et dix analystes (économistes, avocats, spécialistes en sciences sociales et scientifiques, tous experts dans leur domaine), adjoints de recherche, stagiaires et bibliothécaires de recherche. Les bibliothécaires de recherche possèdent un baccalauréat et une maîtrise en bibliothéconomie ou en sciences de l’information.

Les bibliothécaires de recherche affectés à une section répondent directement aux questions des clients parlementaires et épaulent les analystes et les adjoints de recherche. Ils se spécialisent aussi dans les domaines traités par leur section.

Les bibliothécaires de recherche affectés à la Section du genre, de la santé et des affaires sociales, par exemple, développent des compétences dans les domaines des soins de santé, de la main-d’œuvre, de l’emploi, de la sécurité du revenu, de la condition des personnes handicapées et des politiques sociales. Ils peuvent recevoir des demandes sur des sujets connexes comme les traitements médicaux ou les maladies, le vieillissement et les personnes âgées, l’itinérance, la prise en compte de la sexospécificité dans le processus budgétaire, le chômage, l’imposition des organismes de bienfaisance ou les conséquences médicales et sociales de la consommation du cannabis.

Intégration à des équipes pluridisciplinaires

Les sections pluridisciplinaires du SIRP ont vu le jour au début des années 2000, quand les gens ont commencé à se tourner vers Internet pour trouver l’information dont ils avaient besoin.

À l’époque, la prestation des services de la Bibliothèque était assurée par deux directions. Les bibliothécaires faisaient partie de la Direction de l’information et de la documentation qui, comme son nom l’indique, fournissait des services d’information, de recherche et de référence aux parlementaires ainsi qu’à d’autres clients comme la Tribune de la presse parlementaire.

Les analystes étaient membres de la Direction de la recherche parlementaire qui fournissait aux parlementaires ainsi qu’aux comités et associations parlementaires, les résultats de travaux de recherche, des analyses ainsi que des renseignements. La Direction de la recherche parlementaire comptait quatre divisions constituées respectivement de spécialistes dans différents domaines, à savoir les sciences sociales, le droit, l’économie et les sciences autres que les sciences sociales.

Les clients parlementaires de la Bibliothèque ayant adopté Internet, ils pouvaient désormais trouver facilement des renseignements de base. Les parlementaires ont donc commencé à présenter des demandes en analyses et recherches plus longues parce qu’il leur était difficile de trouver ce dont ils avaient besoin en ligne. Parallèlement, les gestionnaires de la Bibliothèque estimaient que les besoins des comités parlementaires en recherche et analyse iraient en augmentant.

Compte tenu de cette évolution, en 2002-2003, la Bibliothèque a testé une nouvelle approche pluridisciplinaire associant analystes et bibliothécaires de recherche dans l’idée de la mettre en œuvre à plus grande échelle. Ainsi, selon le Rapport sur les plans et priorités de 2002-2003, la création des équipes pluridisciplinaires contribuera à :

augmenter la qualité, l’exhaustivité et la rapidité du service offert aux parlementaires;

améliorer la mémoire institutionnelle au profit des comités et associations parlementaires;

intensifier la synergie entre professionnels de la recherche et bibliothécaires;

faciliter le transfert de connaissances et d’expertise des employés plus anciens vers les nouveaux.

Après la période initiale d’essai, en 2004-2005, les bibliothécaires de la Direction de l’information et de la documentation ont été regroupés avec les analystes de la Direction de la recherche parlementaire pour former le SIRP. On est ainsi passé d’une organisation centrée sur les professions à une organisation centrée sur les sujets abordés dans le cadre de laquelle des analystes dans différentes disciplines professionnelles et des bibliothécaires de recherche travaillent côte à côte.

Par ailleurs, le principe du guichet unique a été mis en œuvre de manière à permettre aux clients parlementaires d’avoir accès à tous les services de la Bibliothèque par l’intermédiaire d’une entité centrale.

En 2010-2011, la Bibliothèque a mis sur pied un système de gestion des documents et des dossiers électroniques qui permet de suivre et de livrer les réponses aux demandes des parlementaires.

Évolution des équipes

Initialement, les bibliothécaires de recherche affectés à une section rendaient compte au gestionnaire de ladite section et cela créait des problèmes parce que les bibliothécaires et les analystes avaient des conventions collectives différentes, ainsi que des besoins en formation et des parcours professionnels différents.

En conséquence, en 2017, les bibliothécaires de recherche affectés à une section ont été regroupés dans une équipe distincte, les Services de référence intégrés, sous la direction de leur propre gestionnaire au sein de la Division des services de la référence, de la veille informationnelle et de l’utilisation (RVU). Il en est résulté une meilleure coordination, et les formations et les parcours professionnels se sont avérés plus adéquats.

La Division de la RVU est responsable notamment de la coordination des demandes de services de référence et d’information. Elle contribue aussi à la formation des nouveaux analystes et bibliothécaires sur la manière d’utiliser les bases de données, les catalogues et les autres ressources documentaires de la Bibliothèque.

Fonctionnement du système

Les demandes que reçoit la Bibliothèque de la part de clients parlementaires varient énormément. Des techniciens de recherche répondent aux demandes d’accès à des documents particuliers tels que des documents parlementaires, des articles universitaires, des résumés législatifs et des articles de journaux, et aux demandes d’emprunt de tels documents. Ils répondent aussi à de nombreuses demandes de recherche relatives aux documents parlementaires.

Les bibliothécaires de recherche répondent à des demandes de référence sur toute une panoplie de sujets. Ils fournissent souvent des listes de ressources et des bibliographies annotées. Ils effectuent également des recherches personnalisées. Les députés et leur personnel de circonscription présentent souvent des demandes de renseignements de base pour aider des résidents de leur circonscription, et les bibliothécaires de recherche de la Bibliothèque y répondent.

Quand des députés à titre individuel ou des comités parlementaires ont besoin d’une analyse approfondie ou de connaissances spécialisées, des analystes du SIRP y répondent, au moyen d’une conversation téléphonique rapide, d’un document de recherche personnalisé ou d’une rencontre en personne.

Les bibliothécaires de recherche principaux de la Division de la RVU sont chargés de trier les demandes envoyées par les parlementaires et leur personnel. Les demandes sont attribuées aux divisions de recherche en fonction du sujet et d’autres aspects de la demande. Par exemple, une question sur les navires abandonnés peut être adressée à un bibliothécaire de recherche spécialisé dans le transport ou le droit maritime.

Alors que les bibliothécaires de recherche affectés à une section travaillent en autonomie, les bibliothécaires de recherche et les analystes de chaque section nouent des relations de travail étroites et tendent à travailler de manière dynamique et informelle.

Les analystes sont souvent appelés à répondre à des demandes dans des délais serrés et parfois avec des échéances concurrentes. Ils demandent souvent l’aide d’un bibliothécaire de recherche lorsqu’ils sont pressés par le temps ou qu’ils veulent s’assurer de ne pas être passés à côté de ressources-clés. Un bibliothécaire de recherche peut préparer une liste de ressources sur mesure pour donner à l’analyste un point de départ pour ses recherches. Les analystes sont en mesure de se montrer plus efficaces dans leur travail et de consacrer plus de temps à l’analyse et à la rédaction quand ils demandent au bibliothécaire de recherche de rassembler les informations initiales.

Certaines demandes proviennent de l’interne : elles commencent souvent par la visite d’un analyste à un bibliothécaire de recherche de sa section afin de décider de quel genre d’information ou de ressources ils ont besoin pour répondre à un parlementaire, préparer une note d’information pour un comité ou rédiger une publication.

Il arrive souvent que le bibliothécaire de recherche envoie des renseignements pertinents par courriel. Selon la demande, il peut y avoir un échange dynamique d’information et la demande peut évoluer. Au fur et à mesure que la recherche progresse, l’analyste peut demander des ressources bien précises relativement à certains aspects de la demande. Il ne s’agit en aucune façon d’une démarche à sens unique : les bibliothécaires travaillant sur des demandes de parlementaires consultent souvent les analystes.

Exemples de collaboration

La collaboration des analystes et des bibliothécaires de recherche se présente notamment sous la forme de compilations de ressources documentaires, de projets à long terme et de formations. Les exemples suivants sont représentatifs du type de travail que les analystes et les bibliothécaires de recherche effectuent régulièrement ensemble.

Compilations

Un analyste s’est tourné vers un bibliothécaire de recherche rattaché à sa section parce qu’il avait besoin d’aide pour constituer une liste d’études et de rapports relatifs aux changements climatiques ayant été publiés par des agents du Parlement et des comités parlementaires. L’analyste avait besoin de ces renseignements pour un rapport de recherche. L’analyste a été en mesure, dans la discussion initiale, de clarifier et de préciser ses besoins et d’expliquer les résultats qu’il espérait obtenir.

Le bibliothécaire de recherche a constitué la liste des ressources pertinentes et l’a envoyée directement à l’analyste. L’analyste a transmis la liste à d’autres analystes et aux gestionnaires de section qui en auraient l’utilité, selon lui. Inspiré par la liste, au moins un analyste a déniché une publication pertinente dont ils ignoraient l’existence. Vu son utilité, le document a été traduit et adéquatement formaté de manière à pouvoir être diffusé plus largement au sein de la Bibliothèque.

Projets à long terme

Les analystes et les bibliothécaires de recherche partageant le même champ d’expertise collaborent souvent sur des projets à long terme. Ainsi, il est arrivé qu’un analyste et un bibliothécaire de recherche collaborent sur un projet complexe portant sur les aspects juridiques et politiques de certains problèmes liés aux droits de la personne.

Au départ, un analyste avait pris contact avec le bibliothécaire de recherche de sa section parce qu’un parlementaire souhaitait entreprendre sur le sujet un projet complexe, qui devait inclure des documents de recherche, une bibliographie annotée des sources, une formation pour le personnel du parlementaire sur la veille médiatique en lien avec le sujet et enfin, un colloque ou une présentation de la Bibliothèque du Parlement.

L’analyste et le bibliothécaire de recherche ont travaillé ensemble à l’analyse de la demande. Le bibliothécaire s’est chargé de la bibliographie annotée et de la formation à la veille médiatique, tandis que l’analyste et un analyste d’une autre section s’occupaient de la rédaction de publications relatives aux lois et aux politiques respectivement.

Le bibliothécaire de recherche et les analystes participant au projet ont rencontré le parlementaire et son personnel pour discuter de leurs besoins et de leurs intérêts particuliers en matière d’information. Lors de cette réunion, le bibliothécaire a présenté des informations sur la manière de mettre à profit les ressources de la Bibliothèque pour mettre sur pied une veille médiatique personnalisée afin d’être au courant de ce qui se passe dans le dossier.

Les analystes et le bibliothécaire de recherche ont dû être en communication permanente lors de la rédaction d’une bibliographie annotée et de publications afin que l’information soit organisée de manière cohérente dans leurs documents respectifs. De plus, l’équipe a participé activement à lévaluation des travaux de chacun et a offert des suggestions et commentaires.

Le bibliothécaire de recherche a également cherché des informations relatives au Parlement et à la jurisprudence pertinente pour illustrer certaines idées explorées dans les documents de recherche des analystes. La bibliographie annotée a été ajoutée aux documents de recherche des analystes et présentée de manière que le tout puisse être distribué plus largement.

Enfin, la partie présentation du projet a donné lieu à la préparation d’un colloque de la Bibliothèque du Parlement pour tous les parlementaires intéressés et leur personnel. Le bibliothécaire de recherche a contribué à la conception et à la diffusion des informations à propos du colloque.

Formations

Outre former de nouveaux employés et donner des formations ponctuelles sur des bases de données bien précises, les bibliothécaires de recherche principaux offrent régulièrement des séances de formation sur des sujets comme la recherche juridique à la Bibliothèque du Parlement.

Une de ces séances de formation est proposée aux analystes membres d’associations provinciales du barreau. Elle fait notamment un survol des changements survenus dans un passé récent dans le domaine de la recherche juridique au Canada, et ce, grâce à des outils accessibles au public comme la base de données de l’Institut canadien d’information juridique (CANLII) et des bases de données essentielles accessibles sur abonnement à la Bibliothèque. Cette séance vise à s’assurer que les analystes connaissent toutes les ressources juridiques qu’ils ont à leur disposition et qu’ils en maîtrisent l’utilisation. Une séance de formation comparable est proposée aux bibliothécaires et aux techniciens de recherche à titre d’introduction à la recherche juridique.

D’autres séances de formation sont consacrées aux lois, aux règlements et à la jurisprudence. Ces séances représentent la base à partir de laquelle les bibliothécaires de recherche peuvent développer leurs compétences en recherche juridique afin de répondre aux demandes de leurs propres clients et d’appuyer le travail des analystes dans leur section.

En perpétuelle évolution

Comme c’est le cas pour tous les établissements du savoir, la Bibliothèque du Parlement doit s’adapter à un environnement en perpétuelle évolution. Chaque nomination au Sénat et chaque élection à la Chambre des communes s’accompagne de l’entrée en scène de nouveaux parlementaires et de nouveaux membres du personnel parlementaire. Ils apportent leur expérience du milieu des affaires, du monde universitaire ou de la fonction publique. Bien qu’ils soient généralement en mesure de trouver par eux-mêmes des renseignements de base, ils se tournent souvent vers la Bibliothèque en cas de recherches plus complexes.

Pour s’adapter à cet environnement en perpétuel changement, la Bibliothèque du Parlement change aussi.

Dans son Rapport annuel 2017-2018, la Bibliothèque du Parlement a cerné quatre domaines sur lesquels elle concentrerait ses efforts, à savoir l’analyse sexospécifique, les affaires internationales, les communications en lien avec les comités et les éléments visuels. Les bibliothécaires de recherche et les analystes doivent donc acquérir de nouvelles compétences afin de fournir le genre de services que les parlementaires demandent de plus en plus.

Par exemple, la Bibliothèque du Parlement s’est donné les moyens de créer des cartes par système d’information géographique (SIG). L’équipe responsable, qui inclut des analystes et un bibliothécaire, a ainsi produit 239 cartes pour des clients parlementaires en 2017-2018.

Pour aider les nouveaux parlementaires à tirer le maximum des services de la Bibliothèque, celle-ci a créé un programme d’ambassadeurs. Des employés de la Bibliothèque rendent visite aux nouveaux parlementaires de la Bibliothèque pour les informer, ainsi que leur personnel, des services qu’elle peut leur fournir en fait d’information et de recherche afin d’aider les parlementaires à remplir leurs différents rôles.

Simultanément, la Bibliothèque travaille à améliorer son processus de rétroaction de manière que tous les commentaires, qu’ils soient bons ou mauvais, soient pris en compte.

La formation joue aussi un grand rôle. Comme cela a déjà été dit, les bibliothécaires de recherche transmettent régulièrement informations et stratégies de recherche lors de séances de formation internes. La Bibliothèque fourni à son personnel de formation sur des sujets tels que l’analyse sexospécifique, la rédaction en langage clair et les statistiques.

Conclusion

Depuis l’intégration des bibliothécaires de recherche aux sections pluridisciplinaires du SIRP il y a 15 ans, l’approche adoptée s’est avérée modulable et bénéfique pour les bibliothécaires, les analystes et les clients parlementaires de la Bibliothèque.

La structure organisationnelle donne aux bibliothécaires l’occasion d’acquérir des compétences dans un domaine donné et aux analystes le soutien dont ils ont besoin pour servir les parlementaires ainsi que les comités et associations parlementaires. Grâce à cette structure, la Bibliothèque du Parlement est en mesure d’innover tout en donnant suite aux commentaires qui lui sont faits.

Alors que le bâtiment principal de la Bibliothèque du Parlement restera fermé pendant une décennie, ses bibliothécaires de recherche continueront à travailler avec leurs collègues pour s’assurer que les parlementaires disposent des informations et des recherches dont ils ont besoin.

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