Les bibliothèques législatives dans un gouvernement de consensus : un milieu familier au sein d’un milieu distinct

Article 8 / 15 , Vol 43 No. 1 (Printemps)

Les bibliothèques législatives dans un gouvernement de consensus : un milieu familier au sein d’un milieu distinct

Deux des trois territoires du Nord du Canada ont une assemblée législative fondée sur le modèle du gouvernement de consensus. Certaines des caractéristiques propres à ce système se reflètent dans l’emplacement et l’utilisation de la bibliothèque de leur Parlement. Dans cet article, les auteurs décrivent en quoi l’accès des parlementaires et des autres clients des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut aux ressources bibliothécaires illustre l’ouverture et la coopération associées à cette méthode de gouvernance.

Gerry Burla et Riel Gallant

Dans un gouvernement de consensus, les députés n’ont pas d’allégeance à un parti politique. Ils sont élus en fonction de leur rapprochement avec les collectivités qu’ils représentent. Dans cet environnement, même la Chambre diffère légèrement du Parlement de style britannique traditionnel. En effet, dans la plupart des Parlements, les députés du parti au pouvoir sont assis en face des députés de l’opposition. Or, dans une assemblée législative de consensus, les sièges sont disposés en cercle. Cette configuration est symbolique; les députés sont tous égaux. Le sentiment se répète dans le choix du Cabinet (à noter que les ministres s’assoient près les uns des autres). Le premier ministre et les ministres sont choisis par les députés eux-mêmes à l’occasion d’une séance du Comité territorial chargé des postes de leadership (Territoires du Nord-Ouest) ou du Forum sur le leadership (Nunavut).

Bien que la disposition des sièges en cercle donne une impression d’unité, les députés siègent à titre personnel. Cette individualité peut être intimidante pour certains députés, surtout ceux qui sont nouvellement élus et qui tentent encore de s’orienter. Il n’y a pas d’affiliation à un parti pour créer un lien instantané; c’est chacun pour soi.

La bibliothèque législative peut servir de lieu de rassemblement pour les députés et de lieu où apprendre à se familiariser avec leur environnement. La plupart des députés fréquentent la bibliothèque de leur collectivité ou ont passé du temps dans les salles d’étude de leur établissement d’enseignement. Dans les premiers jours suivant leur élection, on présente aux députés la salle de caucus, la Chambre, les salles des comités, leur bureau et plusieurs autres lieux qu’ils ne connaissent pas nécessairement très bien. La bibliothèque leur offre un milieu qui leur est familier, même s’il s’agit de leur première visite à la bibliothèque législative de ce Parlement.

L’emplacement de la bibliothèque au sein de la cité parlementaire témoigne de cette fonction. Dans les Territoires du Nord-Ouest, la bibliothèque est située directement sous la salle de caucus; les rassemblements et les discussions qui se tiennent dans la salle de caucus peuvent se poursuivre à la bibliothèque de manière beaucoup moins formelle. Tout comme la Chambre, la salle de caucus est de conception circulaire. Elle est plus petite que la Chambre, mais tout de même assez grande pour que tous les députés puissent participer à la discussion. Dans un gouvernement de consensus, la salle de caucus est le lieu où les députés débattent de l’orientation stratégique et des questions d’actualité importantes pour le territoire et les citoyens.

Directement sous la salle de caucus, la bibliothèque offre aux députés qui le souhaitent l’occasion de réaliser des entrevues dans un espace où ils se sentent à l’aise. D’ailleurs, les entrevues et les discours qui s’y déroulent durent souvent plus longtemps que la moyenne. Les députés se servent notamment de cet emplacement pour enregistrer des déclarations liminaires de conférence ou un message de reconnaissance pour des activités ou des réunions auxquelles ils ne peuvent malheureusement pas assister. La présence de la bibliothèque en arrière-plan confère une ambiance chaleureuse à ces déclarations.

Au Nunavut, la bibliothèque est située à l’étage supérieur de la cité parlementaire. Les simples députés du premier étage et les ministres du deuxième s’y arrêtent fréquemment lorsqu’ils se rendent au bureau du greffier. L’atmosphère à la bibliothèque est détendue et accueillante. Les visiteurs commencent souvent par jeter un coup d’œil aux nouveautés disposées près de l’entrée principale avant de consulter le service des références ou la collection. Certains préfèrent utiliser la porte arrière pour s’installer dans l’aire de lecture avec vue sur l’extrémité ouest de la ville.

En plus de constituer un arrière-plan agréable et invitant, les documents de la bibliothèque sont utiles. Les députés peuvent s’asseoir et lire les périodiques pour connaître l’actualité locale de leur collectivité. En outre, la bibliothèque renferme des rapports et des mémoires de recherche sur divers sujets d’intérêt, de manière à mieux informer les députés.

La recherche est une tâche importante. Or, une réalité malheureuse du Nord est que les ministères ne sont pas tous dotés d’une bibliothèque. La bibliothèque législative remplit cette fonction sur demande. Tous les députés peuvent profiter des ressources de la bibliothèque. Les rapports annuels, les cadres stratégiques et la documentation thématique de plusieurs décennies sont inclus dans la collection de la bibliothèque. Le personnel de la bibliothèque se sert de ces ressources pour répondre aux questions de référence qui nécessitent une recherche en profondeur de même que pour aider aux travaux de l’unité de recherche de l’assemblée législative. Compte tenu du nombre limité de membres du personnel de l’assemblée législative mis à la disposition des députés pour les aider, les partenariats entre les unités sont nécessaires pour atteindre les résultats voulus.

Les renseignements fournis aux députés par la division de la recherche et la bibliothèque peuvent être présentés à la Chambre dans la langue que le député choisit. Au Nunavut, le contenu peut être livré en anglais, en français, en inuinnaqtun ou en inuktitut. Les Territoires du Nord-Ouest confèrent aux députés le droit de s’exprimer dans ces quatre mêmes langues, ainsi qu’en esclave du Nord ou du Sud, en cri, en chipewyan, en gwich’in, en inuvialuktun ou en tłı̨chǫ. Les bibliothèques font tout leur possible pour acquérir et offrir le matériel dans ces langues officielles (entre autres) pour les besoins des députés et de la population des territoires du Nord, quoique d’autres ministères offrent des services de traduction.

La bibliothèque est imprégnée de la tradition, mais évolue en fonction de l’avenir. Le personnel de l’assemblée législative collabore avec la bibliothèque pour surmonter les grandes distances qui séparent les collectivités. La consultation des collectivités dans le cadre des visites des comités fait partie intégrante d’un gouvernement de consensus. La bibliothèque conçoit constamment de nouveaux moyens pour permettre aux membres des comités d’accéder aux ressources et à l’information nécessaires pour répondre aux besoins des collectivités et des députés.

La bibliothèque législative de la cité parlementaire du gouvernement de consensus des territoires du Nord du Canada reflète l’ouverture et la coopération associées à cette méthode de gouvernance. Tout comme la population que les députés représentent, la bibliothèque conserve autant que possible les traditions du Nord tout en regardant vers l’avenir et les innovations en perspective.

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