Latitude et pouvoir de réserve de la Couronne

Article 4 / 11 , Vol 34 No 2 (Été)

Latitude et pouvoir de réserve de la Couronne

La décision de la gouverneure générale Michaëlle Jean d’accorder la prorogation demandée par le premier ministre Harper en 2008 et 2009 a donné lieu à de nombreux débats, parmi les personnes intéressées au parlementarisme, sur le pouvoir discrétionnaire d’un gouverneur général de rejeter la recommandation d’un premier ministre. Dans le présent article, l’auteur est d’accord avec ceux qui croient que Mme Jean n’a pas commis d’erreur en se conformant à ces demandes, mais il rejette l’idée qu’un gouverneur général qui refuserait une telle requête d’un premier ministre violerait une convention constitutionnelle. Il présente l’argument que, dans le système britannique, la monarchie ou son représentant, en exerçant l’un des pouvoirs légaux de la Couronne en lien avec le Parlement, conserve le droit de rejeter la recommandation du premier ministre si le fait de suivre celle-ci s’avérait nettement nuisible à la démocratie parlementaire. Ce raisonnement s’applique tant à la prorogation qu’à la dissolution du Parlement.

Dans un article récent, Nicholas MacDonald et James Bowden1 soulignent avec justesse qu’à l’ère démocratique, la Couronne ne devrait utiliser que rarement son pouvoir de réserve. Ils affirment que « la plupart des universitaires » s’entendent pour dire que c’est uniquement « dans les circonstances les plus exceptionnelles » que le gouverneur général peut rejeter la recommandation du premier ministre. J’appuie entièrement cet énoncé et j’ajouterai même que ce sont presque tous les universitaires qui conviennent de cet énoncé général. C’est, en effet, la convention constitutionnelle qui a rendu possible la transformation du système parlementaire dominé par la Couronne en démocratie parlementaire. Mais cette convention s’accompagne clairement d’une convention corollaire sur les circonstances exceptionnelles dans lesquelles la Couronne pourrait exercer son pouvoir discrétionnaire et dire « non » à un premier ministre. S’il existe une convention selon laquelle un gouverneur général accepte normalement la recommandation d’un premier ministre dans l’exercice de ses pouvoirs légaux relativement au Parlement, il doit y avoir aussi une convention ou un principe qui permette de définir ces « circonstances les plus exceptionnelles » dans lesquelles le gouverneur général agirait conformément à la constitution en rejetant la recommandation du premier ministre.

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Gouvernement minoritaire et convention constitutionnelle

Article 3 / 12 , Vol 33 No 2 (Été)

Gouvernement minoritaire et convention constitutionnelle

Quatre années de gouvernement minoritaire ont mis les institutions parlementaires canadiennes à rude épreuve. Le présent article propose des façons de renforcer celles-ci, que le prochain gouvernement soit minoritaire ou non.

En janvier 2010, l’Institute for Government du Royaume-Uni a publié un rapport intitulé Making Minority Government Work, qui vise à préparer ce pays au gouvernement minoritaire qui pourrait y être élu plus tard cette année. L’équipe de chercheurs à l’origine de ce document a visité des parlements de tradition britannique qui ont connu des gouvernements minoritaires au cours des dernières années, soit le Canada, la Nouvelle-Zélande et l’Écosse. Le titre du chapitre sur le Canada est « Canada’s Dysfunctional Minority Parliament » et le message qu’il envoie aux parlementaires britanniques est que, s’ils veulent savoir comment ne pas faire fonctionner un parlement minoritaire, ils n’ont qu’à bien regarder notre pays1.

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