Le Sénat – Une chambre parlementaire essentielle
Le Sénat joue un rôle essentiel dans le format et la fonction du Parlement canadien. Dans l’article, l’honorable Noël A. Kinsella souligne le rôle du Sénat à titre de contrepoids régional à la représentation selon la population, de source indépendante d’examen législatif, d’excellente source d’études approfondies sur les politiques et d’endroit où les nominations peuvent parfois équilibrer les inégalités dans la représentation de la population canadienne à la chambre élue. Cet article provient en partie des commentaires présentés à l’occasion de la 31e Conférence des présidents d’assemblée du Canada, tenue à Ottawa.
Le Sénat se retrouve à nouveau au cœur d’un débat constitutionnel. En effet, en novembre dernier, la Cour suprême du Canada a siégé pendant trois jours pour entendre des arguments sur le Sénat et discuter de diverses questions portant sur sa réforme ou son abolition. Ces questions ont été posées par le gouvernement fédéral afin de clarifier les paramètres de changements ou de réformes possibles du Sénat. En résumé, le gouvernement veut savoir ce qu’il peut faire sans recourir au mode de révision constitutionnelle général (7/50) ou au mode de l’unanimité. Pareille attention n’est pas nouvelle : à Québec, en 1864, les Pères de la Confédération ont consacré six jours de débat à la question du Sénat.
Quelle que soit l’issue du renvoi à la Cour suprême, on peut dire que le Sénat est là pour rester, du moins pour ce qui est de l’avenir prévisible, et que c’est une bonne chose. Le Sénat remplit une fonction utile qui est indispensable à l’efficacité du processus législatif, à la conception de bonnes politiques et au maintien de la cohésion nationale. Il conviendrait peut-être, tout d’abord, d’examiner brièvement la structure et la composition du Sénat.
Structure
Le nombre normal de sénateurs est aujourd’hui de 105. Initialement, il y en avait 72, soit 24 pour chacune des trois régions que comprenait le Canada au moment de l’établissement de la Confédération. À mesure que le Canada s’agrandissait, des modifications ont été apportées pour tenir compte des nouvelles provinces. En 1915, le Parlement de Westminster a modifié l’Acte de l’Amérique du Nord britannique pour ajouter une quatrième région, la division de l’Ouest. Les provinces du Manitoba, de la Saskatchewan, de l’Alberta et de la Colombie-Britannique ont obtenu six sénateurs chacune. Six autres sièges ont été créés au moment de l’entrée de Terre-Neuve-et-Labrador dans la Confédération en 1949 et, enfin, trois nouveaux sièges se sont ajoutés au fil des ans, un pour chacun des territoires.
La structure régionale du Sénat a été conçue pour accommoder les provinces les moins peuplées. Sans cet accommodement, il n’y aurait pas eu de Confédération en 1867. Hier comme aujourd’hui, le Canada était aux prises avec une répartition démographique inégale. Plus de 60 % de la population canadienne est concentrée dans deux provinces seulement, l’Ontario et le Québec. Les Pères de la Confédération devaient aussi s’attaquer à ce déséquilibre démographique pour assurer une saine représentation régionale et, dans le cas du Québec, pour tenir compte de ses caractéristiques linguistiques, juridiques et religieuses distinctes. La solution à ces problèmes était le Sénat. En misant sur l’égalité régionale, on est parvenu à accorder aux différentes parties du pays la reconnaissance et le poids correspondant à leurs intérêts et à leurs caractéristiques au sein d’un parlement bicaméral.
Le long mandat des sénateurs – initialement à vie, puis ramené à 75 ans en 1965 – visait à garantir leur indépendance et leur autonomie. La nomination assurerait que le Sénat ne ni serait comptable ni soumis aux pressions de l’extérieur. À cet égard, les sénateurs sont semblables aux juges de nos cours fédérales. Ceux-ci sont également nommés, ce qui garantit leur indépendance et les met à l’abri de toute ingérence indue du gouvernement ou du Parlement. L’indépendance des sénateurs aujourd’hui est toujours réelle, mais elle est tempérée par les allégeances politiques de même que l’autolimitation. Le Sénat moderne reconnaît qu’il doit céder à la volonté des Communes en cas de sérieux désaccords sur des projets de loi, à moins d’avoir une raison impérieuse crédible pour ne pas le faire. Cette autolimitation fait partie de l’évolution et de la transformation du Sénat au fil des ans. Cette transformation a coïncidé avec l’élargissement du vote, la croissance du rôle du gouvernement et l’activité accrue des députés à titre de défenseurs de leurs électeurs. Le Sénat moderne n’est plus l’assemblée de l’élite fortunée. Au contraire, il est devenu réellement la chambre des droits constitutionnels et des intérêts des minorités, pas seulement celle de la représentation régionale. Le Sénat compte actuellement un plus grand pourcentage de femmes que la Chambre des communes, soit 38 % contre 24 %. Il tend aussi à mieux représenter les Autochtones et les minorités visibles. Il se sert de son pouvoir pour remplir ses obligations parlementaires, qui consistent à examiner en profondeur les mesures législatives et à concevoir les politiques d’intérêt public. Dans l’exercice de ces fonctions, le Sénat continue d’agir à titre d’organe complémentaire de la Chambre des communes et, en tant que tel, il conserve son importance et sa pertinence pour la gouvernance efficace du pays.
En somme, les avantages souvent invoqués pour la création de parlements bicaméraux ont trait à leur capacité d’assurer la représentation de diverses populations, de faciliter la tenue de débats plus poussés et plus longs, d’obliger un deuxième regard sur les projets de loi et de soumettre l’exécutif à une surveillance accrue. Pareille création vise à établir un certain niveau de redondance – pas nécessairement de répétition. Nombreux sont ceux qui estiment que les secondes chambres possèdent l’importante capacité d’agir comme conseiller institutionnel convaincant, en forçant la reformulation ou la reconception de projets de loi, en éclairant un débat donné en y ajoutant une certaine dose de sagesse et en permettant une plus grande participation publique que ne peut le faire une seule chambre.
Le Sénat contribue au travail du Parlement ainsi qu’à la nation de plusieurs façons, que ce soit en matière d’examen législatif, de conception des politiques ou de promotion de la cohésion nationale.
Examen législatif
Une des principales fonctions de tout parlement consiste à examiner les projets de loi. Dans notre Parlement fédéral, l’adoption et l’édiction de tout projet de loi nécessitent l’approbation des deux Chambres. En pratique, évidemment, la priorité au Parlement est accordée aux projets de loi du gouvernement, bien que les autres parlementaires puissent également déposer des projets de loi.
Comme c’est typiquement le cas dans les parlements d’inspiration britannique, la plupart des projets de loi du gouvernement viennent de la Chambre des communes. Durant une session, qui peut durer quelques semaines, des mois voire plusieurs années, le gouvernement peut présenter quantité de projets de loi aux Communes. Certaines de ces mesures sont des projets de loi de crédits, qui, en pratique, ne sont jamais amendés par le Sénat. Toutes les autres mesures législatives, toutefois, notamment les projets de loi d’exécution du budget, peuvent faire l’objet d’un examen approfondi par le Sénat, qui peut les adopter, les amender ou les rejeter. Le processus d’examen est structurellement semblable à celui appliqué à la Chambre des communes : il y a trois lectures, et un comité examine habituellement le principe du projet de loi après le débat de deuxième lecture. L’objet de l’examen par le Sénat consiste à améliorer le projet de loi. Le rejet est certes possible, mais ce n’est ni l’option principale ni un résultat probable. Après tout, la plupart des projets de loi du gouvernement arrivent au Sénat comme mesures législatives déjà adoptées par les Communes.
Dans le cadre politique qui s’est constitué depuis une quarantaine d’années, la discipline de parti aux Communes guide toutes leurs activités, y compris l’examen des projets de loi. Lorsqu’un projet de loi est déposé au Sénat, la dynamique peut changer quelque peu, même si le gouvernement est majoritaire. Le débat, par exemple, peut être centré sur un élément particulier du projet de loi soulignant un aspect donné qui pourrait avoir été peu examiné ou carrément négligé par les Communes. S’il est vrai que la discipline de parti est aussi présente au Sénat, il reste que son exercice est plus limité et que rien n’empêche les sénateurs de soulever des questions importantes durant le débat.
Un exemple de cela est survenu en 1999, quand le Sénat a examiné un projet de loi mettant à jour les procédures d’extradition. Le projet de loi avait été qualifié de simple mesure d’ordre administratif et avait été adopté rapidement aux Communes. À la suite à son dépôt au Sénat, le débat s’est bientôt porté sur le pouvoir du ministre de la Justice et procureur général d’autoriser des extraditions dans des pays pratiquant la peine capitale – qui avait été abolie au Canada. Comme il arrive souvent au Sénat, le débat a transcendé les lignes de parti. Le gouvernement a pu résister aux pressions visant à amender le projet de loi, mais s’il a gagné la bataille au Sénat, il a perdu la guerre devant les tribunaux. Les sénateurs s’enorgueillissent en fait de la fréquence avec laquelle les tribunaux citent les débats du Sénat et de ses comités et, en soulevant ces questions, le Sénat attire l’attention sur des aspects de projets de loi qui sont parfois insuffisamment examinés ailleurs.
Cet exemple démontre que le Sénat peut choisir de se pencher sur des aspects d’un projet de loi qui diffèrent de ceux auxquels la Chambre des communes a porté attention. Cela démontre aussi le rôle complémentaire que le Sénat peut jouer dans le processus législatif.
Plus récemment, juste avant la prorogation, le Sénat a été saisi du controversé projet de loi C-377, Loi modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu (exigences applicables aux organisations ouvrières). Le projet de loi a été renvoyé de la Chambre des communes au Sénat. Le débat au Sénat a été assez intense et a transcendé les lignes de parti. Des amendements ont été proposés à l’étape de la troisième lecture, et l’acceptation d’un d’entre eux s’est traduite par d’importantes modifications du projet de loi. Le Parlement a été prorogé avant que les deux Chambres aient pu s’entendre. Ce projet de loi a été rétabli sous sa forme originale et se trouve maintenant de nouveau devant le Sénat, qui n’a pas encore décidé comment il procéderait.
Ces exemples traitent de contestations directes de projets de loi et de changements proposés à ces derniers. Une autre façon pour le Sénat de faire office de conseiller et d’influer indirectement sur la teneur des projets de loi est la pratique de l’étude préalable. Par un tel examen, les comités sénatoriaux peuvent étudier la teneur de projets de loi dont la Chambre est toujours saisie. De cette manière, le Sénat peut commencer son examen détaillé d’un projet de loi et faire des recommandations avant de l’avoir reçu. Des propositions d’amendement peuvent être faites tôt dans le processus législatif pour refléter cet apport, et le Sénat peut se pencher sur le projet de loi sans mettre en péril le calendrier de l’étude du projet de loi.
Les observations constituent un autre outil procédural dont dispose le Sénat. En plus de proposer des amendements, les comités sénatoriaux peuvent annexer des observations à un rapport sur un projet de loi. Pareilles observations peuvent porter sur des préoccupations soulevées durant les audiences ou sur des questions qui dépassent la portée du projet de loi. En faisant des observations, les comités peuvent souligner des questions à résoudre et veiller à ce que les engagements pris durant les audiences ne soient pas oubliés. Les observations ne sont faites qu’à titre informatif et n’entraînent aucune obligation. Elles n’en constituent pas moins un puissant outil pour les comités, rappelant au gouvernement que, même si le Sénat adopte un projet de loi sans l’amender, la situation est surveillée de près et que des progrès sont attendus.
Ces usages et outils permettent au Sénat d’influer sur le travail législatif du Parlement, d’exprimer les préoccupations négligées par la Chambre des communes et de faire le suivi de questions et d’engagements sur une période de plusieurs années. Ils améliorent et renforcent le Parlement dans son rôle d’organe législatif.
Budget des dépenses
Il faut aussi dire quelques mots sur la contribution du Sénat au travail du Parlement sur le budget des dépenses. À la Chambre des communes, l’examen du budget des dépenses est confié à chacun des comités en fonction de leur portefeuille. Chacun des comités doit examiner une partie du budget des dépenses et en faire rapport avant une date donnée. Si un comité ne présente pas son rapport à la date fixée, cette partie du budget des dépenses est réputée avoir été adoptée par le comité, et le processus menant à un projet de loi de crédits suit son cours de façon largement automatique.
Au Sénat, l’examen du budget des dépenses n’est pas confié à chacun des comités en fonction du portefeuille qui le concerne. Il est plutôt confié au Comité des finances nationales. Compte tenu du contrôle qu’exercent les Communes sur les deniers publics, ni le Comité ni le Sénat n’adoptent le budget des dépenses. Toutefois, le Comité des finances nationales procède à un examen approfondi du budget des dépenses, invitant des ministres, des représentants du Conseil du Trésor et d’autres acteurs à témoigner devant lui, avant de déposer son rapport au Sénat. Ce rapport est ensuite débattu et mis aux voix au Sénat, servant ensuite de toile de fond et de source d’informations pour l’étude du projet de loi de crédits. Le Comité des finances nationales présente en outre une série de rapports spécifiques sur des aspects particuliers du budget des dépenses durant toute l’année, suscitant ainsi une attention parlementaire soutenue et ciblée.
Cette démarche orientée conçue pour l’examen du budget des dépenses permet au Sénat de faire une analyse globale et uniforme. La continuité de la composition du Comité des finances nationales, caractéristique propre aux comités sénatoriaux, permet aux sénateurs d’avoir une connaissance approfondie du cycle budgétaire et financier, par comprendre la structure des livres bleus et l’information technique qu’ils renferment. Les observateurs du Parlement ont fait remarquer que, dans nombre d’exercices financiers, le Sénat peut constituer le seul organe parlementaire à tenir des audiences publiques et à dresser un rapport de fond sur les dépenses gouvernementales annuelles. Lorsqu’il s’est présenté devant le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires de la Chambre des communes, le professeur Paul Thomas, entre autres, a souligné que le Sénat fait du bon travail sur le budget des dépenses1, centrant son attention sur un aspect du travail parlementaire qui, bien qu’aride et complexe, n’en est pas moins essentiel à la promotion d’une gouvernance sensée et responsable.
Examen des politiques
En tant que chambre d’investigation, le Sénat peut servir d’« incubateur » d’idées. Compte tenu de la relative stabilité de sa composition et du cadre moins partisan du Sénat, les sénateurs peuvent consacrer plus de temps aux études d’investigation. Ils peuvent centrer leurs efforts, penser à l’avenir et réfléchir aux perspectives et aux besoins à long terme dans un domaine donné. Cette continuité et cette constance ont permis au Sénat de devenir la mémoire institutionnelle du Parlement.
L’examen des politiques au Sénat est réalisé par des comités composés de personnes qui sont directement intégrées au système de gouvernance nationale. Les sénateurs ne sont pas des universitaires ou des conseillers politiques pouvant pondre de brillantes idées sans pouvoir faire un suivi ou qui n’ont pas à se soucier de leur exécution. Les sénateurs veilleront à donner suite de manière continue aux recommandations et au travail des comités. Ils sont bien placés pour s’assurer que les recommandations stratégiques ne soient pas oubliées.
Les mandats plus généraux des comités du Sénat leur permettent d’aborder les questions de façon holistique. Le Sénat a coutume de défendre des causes d’intérêt public, s’attaquant souvent à des questions controversées ou politiquement délicates. Qu’il s’agisse de l’important rapport Croll sur la pauvreté au Canada ou du rapport Davey sur les médias de masse, les enquêtes sénatoriales représentent un important ajout au rôle purement législatif de la Chambre. Ces exemples illustrent une façon de faire devenue encore plus propre aux travaux du Sénat. En effet, ces études des politiques fournissent l’information de base permettant aux sénateurs d’examiner les projets de loi de manière plus intelligente et elles créent des possibilités pour l’initiation indirecte de projets de loi.
L’importante contribution du Sénat aux études sur les politiques est reconnue depuis plus de 50 ans. Se penchant sur le Sénat durant une période remontant à 1920, F.A. Kunz a souligné que la véritable valeur de ce travail
« réside dans l’effet éducatif à long terme des témoignages et des informations recueillis par les comités durant leurs travaux. Les comités ne règlent pas tout, mais ils contribuent à l’étude du sujet et préparent le terrain à des discussions plus poussées au Parlement, dans les ministères intéressés et dans le grand public. Leur champ d’action optimal se situe dans les domaines où les problèmes sont encore trop peu définis, trop controversés ou trop difficiles à cerner pour que les solutions soient simples et directes2. »
La valeur de la contribution du Sénat à la conception de politiques continue d’être reconnue par les observateurs du Parlement, ce dont les sénateurs sont très fiers.
Cohésion nationale
La troisième fonction vitale du Sénat, la promotion de la cohésion nationale, existe depuis la fondation de la Confédération. La structure du Sénat constituait un élément essentiel de l’accord menant à la Confédération, soit l’établissement d’une assemblée à laquelle les régions les moins populeuses du pays auraient un niveau de représentation supérieur à leur poids démographique. Si le Canada est devenu un pays, il le doit en bonne partie au fait que les Pères de la Confédération ont convenu de créer une assemblée nommée, le Sénat, pour représenter les régions.
Prenons, à titre d’exemple, le Nouveau-Brunswick, une petite province qui compte 10 parlementaires dans chaque chambre. Aux Communes, les 10 députés ne représentent qu’une infime portion de l’ensemble des députés. Mais au Sénat, les 10 sénateurs représentent une portion beaucoup plus grande de l’ensemble des sénateurs, de sorte qu’ils ont plus de poids pour défendre les besoins et faire valoir les perspectives de leur province. Il en va de même pour d’autres provinces.
En outre, sans le Sénat, la proportion de parlementaires du Québec tomberait sans doute, avec le temps, encore plus sous le seuil considéré comme critique de 25 % de représentation au Parlement. La voix du Québec au Parlement fédéral, si essentielle au maintien de son caractère linguistique, juridique et historique, deviendrait de plus en plus marginale. Un tel état de choses pourrait avoir de graves conséquences à long terme sur le Canada.
Le rôle du Sénat qui consiste à promouvoir la cohésion du pays ne se limite cependant pas à donner une voix aux secteurs géographiques moins peuplés. Le Sénat joue un rôle similaire en ce qui concerne les minorités. Les premiers ministres peuvent se servir des nominations pour veiller à ce que toute la richesse de la société canadienne soit bien représentée au Parlement. Les sénateurs reconnaissent que leur rôle consiste, en bonne partie, à soutenir, à aider et à protéger les minorités et les communautés d’intérêts, qu’elles soient culturelles, linguistiques, éducationnelles, professionnelles, économiques ou axées sur des causes charitables de tout genre. Le rôle est malléable et adaptable, mais important.
Conclusion
Tout observateur de la politique canadienne sait que le débat sur la façon de modifier le Sénat a commencé dès la création de la Confédération et qu’il constitue depuis une constante dans l’histoire du pays. Une série de plans ont été proposés et l’institution a évolué au fil de son existence.
Cependant, quand la discussion porte sur la façon de modifier le Sénat, on accorde souvent trop peu d’attention aux rôles que joue l’institution au sein du Parlement et à la façon dont ces rôles seraient touchés par la réforme.
On peut dire, plus simplement, que le Sénat sert en quelque sorte de frein au Parlement en veillant à ce que tous les points de vue soient recueillis et en présentant les choses dans une perspective à long terme. Le Sénat examine les projets de loi, donne des conseils et analyse les enjeux en profondeur. Il peut servir de guide et faire des suggestions à la Chambre des communes et à l’exécutif en se fondant sur son expérience et son savoir-faire.
Les caractéristiques fondamentales du Sénat lui permettent d’exercer ces fonctions diverses. La durée fixe du mandat des sénateurs assure que l’attention sera maintenue durant une longue période sans les interruptions des cycles électoraux. Le fait que les sénateurs soient nommés peut avoir pour effet d’atténuer le niveau de partisanerie à la Chambre haute et accroître le nombre de groupes sous-représentés du côté des Communes. En outre, le fait que, pour nombre de sénateurs, la nomination au Sénat constitue la dernière étape dans une carrière déjà couronnée de succès contribue aussi à la nature très différente de l’institution.
Tout cela ne veut pas dire qu’on ne peut modifier le Sénat. Toutefois, pour s’interroger sur leur Chambre haute et sur le rôle qu’ils souhaitent la voir jouer, les Canadiens doivent absolument comprendre en quoi consiste aujourd’hui cette institution; ils seront ainsi en mesure de discuter des façons de miser sur les forces du Sénat.
Notes
- Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires de la Chambre des communes, Témoignages, 41e législature, 1re session, 7 mai 2012, p. 13.
- F.A. Kunz (1965): The Modern Senate of Canada: A Re-appraisal, 1925-1963, p. 265-266. [traduction].