Esquisses des parlements et de leur passé : Les boiseries de l’hôtel du Parlement de Québec Vol 39 No 2
Fidèle à la devise Je me souviens, l’hôtel du Parlement de Québec nous présente, comme un livre ouvert, une galerie de personnages glorieux.
L’hôtel du Parlement constitue un véritable monument à la gloire des femmes et des hommes qui ont marqué l’histoire du Québec. À l’intérieur de l’édifice, gravé sur des lambris d’appui, on trouve un total de 84 noms de figures historiques.
Dans le hall principal du parlement, tous les blasons commémorent des personnages du Régime français. Un concept de symétrie harmonise le tout. Les écussons qui sont vis-à-vis appartiennent à des figures qui ont joué des rôles similaires par le passé. Un explorateur fait face à un explorateur, un intendant fait face à un intendant, etc.
Au premier étage, du côté de la salle de l’Assemblée nationale, des députés de la Chambre d’assemblée du Bas-Canada sont mis en valeur; du côté de la salle du Conseil législatif, on fait de même avec des membres de la Chambre haute. On remarque que bon nombre de ces parlementaires ont été membres du premier Parlement en 1792.
Si cet ensemble représente bien les tendances politiques opposant les patriotes et les bureaucrates, il demeure que les réformistes modérés ont la part belle. Cette majorité a défendu les intérêts de la nation canadienne-française, et ce, tout en témoignant un véritable attachement aux institutions parlementaires britanniques. Plusieurs ont aussi dénoncé l’Union de 1840.
Quant aux escaliers, ceux-ci sont dédiés aux gouverneurs généraux du Canada au moment de la construction de l’édifice (1877-1886), aux premiers lieutenants-gouverneurs du Québec, aux premiers historiens du Canada français, aux saints martyrs canadiens et à d’illustres évêques.
Malheureusement, aucun document d’archives n’indique les raisons pour lesquels Eugène-Étienne Taché, le concepteur de l’hôtel du Parlement, a choisi cette série de personnages en particulier. Deux indices nous permettent toutefois d’affirmer que le livre Histoire du Canada de François-Xavier Garneau (1845) a été source d’inspiration. À preuve, comme le fait Garneau dans son ouvrage, Taché inscrit erronément le nom de « Verazani » dans les boiseries, plutôt que « Verrazzano ». De même, c’est le nom de Sébastien Cabot et non celui de son père Jean Cabot qui est gravé dans les boiseries, car Garneau met autant sinon plus d’emphase sur le fils que sur le père dans son livre.
Fidèle à la devise Je me souviens, l’hôtel du Parlement de Québec nous présente donc, comme un livre ouvert, une galerie de personnages glorieux. L’œuvre architecturale de Taché et l’œuvre historique de Garneau ont, somme toute, en commun de faire mentir Lord Durham qui, dans son rapport de 1839, écrivait que les Canadiens étaient « un peuple sans histoire ni littérature ».